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PROJET DE LOI relatif à la croissance et la transformation des entreprises (PACTE)

Ministres :
Bruno LE MAIRE, Ministre de l’Économie et des Finances
Delphine GENY-STEPHANN, Secrétaire d’État auprès du Ministre de l’Économie et des Finances
Commission spéciale :
Présidente : Olivia GREGOIRE
Rapporteur général : Roland LESCURE
Rapporteur chapitre I : Denis SOMMER
Rapporteur chapitre II (articles 20 à 39) : Jean-Noël BARROT (Modem)
Rapporteure chapitre II (articles 40 à 56) : Marie LEBEC
Rapporteure chapitres III et IV : Coralie DUBOST
Responsable LaREM : Adrien TAQUET


Une commission spéciale pour l’examen du projet de loi :
Sur demande du Gouvernement ou de l’Assemblée nationale, un projet ou une proposition de loi peut être renvoyé pour examen à une commission spécialement désignée à cet effet. C’est généralement le cas pour les projets de loi qui abordent des sujets transversaux. La demande de création d’une commission spéciale pour l’examen de ce projet de loi a été formalisée par le Président du Groupe LaREM le 18 juin 2018, en vertu de l’article 32 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Cette commission demeurera compétente jusqu’à ce que ce texte ait fait l’objet d’une décision définitive. Elle est composée de 71 membres, dont 39 LaREM, 13 LR, 6 MoDem, 4 UDI-AGIR, 4 NG, 2 LFI, 2 GDR et 1 NI. Les travaux en commission spéciale se déroulent selon les mêmes règles que les commissions permanentes. La particularité d’une commission spéciale est qu’elle regroupe des députés issus de toutes les commissions permanentes et que son existence est limitée à la durée d’un projet de loi ou d’une proposition de loi.


L’essentiel

  • Ce projet de loi, issu d’un processus de co-construction innovant avec l’ensemble des acteurs (régions, parlementaires, CESE, associations professionnelles, syndicats) et une large consultation menée notamment par les binômes réunissant des élus et des membres de la société civile (en particulier issus du monde de l’entreprise), a trois objectifs principaux : libérer, protéger et unir. Ils se déclinent dans ce texte essentiellement en deux volets :
    – Libérer : lever les obstacles et donner aux entreprises les outils pour se transformer, grandir et créer des emplois, notamment en simplifiant la création et la transmission (chapitre I) et en améliorant leur financement (chapitre II) ;
    – Protéger et unir : transformer le modèle d’entreprise français pour l’adapter aux enjeux du XXIème siècle, en associant mieux les salariés aux résultats de l’entreprise avec l’amélioration des dispositifs d’intéressement et de participation, en refondant le rôle de l’Etat actionnaire (chapitre II) et en redéfinissant la place de l’entreprise dans la société avec la modification du Code civil (chapitre III).
  • Les mesures principales du projet de loi :
    – simplification des démarches et création d’un guichet unique électronique pour la création et la vie des entreprises (article 1) ;
    – allègement et simplification des seuils d’effectifs de salariés dans les entreprises, dont la quantité (199 seuils actuellement) et la complexité constituent un frein à l’emploi.
    Cette simplification passera notamment par le regroupement des seuils sur les niveaux de 11, 50 et 250 salariés avec la suppression ou le relèvement de plusieurs seuils dont celui de 20 salariés (article 6) ;
    – transformation de l’accompagnement à l’export et l’amélioration de la gouvernance de Business France (article 7) ;
    – simplification des conditions pour le rebond et la fin d’activité, avec notamment l’amélioration des conditions de rétablissement personnel et le développement de la procédure de liquidation simplifiée (articles 14 à 19) ;
    – développement de l’épargne retraite (article 20), renforcement du fonds Eurocroissance pour augmenter la participation de l’assurance-vie au financement des entreprises (article 21) et amélioration du plan d’épargne en actions PME (PEA-PME) avec l’ouverture aux titres émis dans le cadre du financement participatif (article 27) ;
    – transformation et modernisation de la gouvernance de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) (articles 30 à 39) ;
    – cessions de participations publiques dans Aéroports de Paris, la Française des Jeux et ENGIE pour alimenter le Fonds pour l’innovation de rupture avec un objectif total de 10 Md€ (articles 44 à 54) ;
    – suppression du forfait social (article 57) versé au titre de l’intéressement pour les entreprises de moins de 250 salariés et sur l’ensemble des versements d’épargne salariale pour les moins de 50 salariés, ainsi que le développement de l’épargne salariale (article 58) et de l’actionnariat salarié (articles 59 et 60) ;
    – définition de l’objet social des entreprises : modification de l’article 1833 du Code civil pour consacrer la notion d’ « intérêt social » de l’entreprise et la nécessité de prendre en considération les enjeux sociaux et environnementaux (article 61) ;
    – renforcement de la présence des administrateurs salariés dans les conseils d’administration (passage de 1 à 2 pour les conseils comptant plus de 8 administrateurs non-salariés) et élargissement aux mutuelles, unions et fédérations (article 62).

Éléments de présentation, contexte et enjeux

Le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises (« PACTE ») a été présenté en Conseil des ministres le 18 juin 2018 par Bruno LE MAIRE, Ministre de l’Économie et des Finances. Il s’agit d’une nouvelle étape dans la volonté de « libérer, protéger et unir » l’économie française et améliorer la participation des salariés. Il s’inscrit dans la continuité de la réforme du droit du travail, de la transformation de la formation professionnelle, ainsi que des mesures déjà adoptées et à venir en matière fiscale.

➢ Plusieurs constats sur les entreprises en France

Les principales mesures de ce projet de loi visent à répondre à plusieurs constats qui concernent les entreprises françaises :

  • les entreprises sont la principale source d’emplois en France avec 66% de la population active employée par 3,9 millions d’entreprises. Le secteur privé employait, fin 2017, près de 19,3 M de personnes ;
  • les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises de traille intermédiaire (ETI) créent le plus d’emplois. Entre 2009 et 2015 : 100 000 emplois nets créés par les PME et 300 000 emplois nets créés par les ETI ;
  • les entreprises en France sont de trop petite taille et ont des difficultés pour grandir. Selon l’Insee , la France compte 5 800 ETI pour 140 000 PME non microentreprises, qui emploient respectivement 25% et 28% des salariés. En comparaison, l’Allemagne compte 12 500 ETI ;
  • il existe trop de seuils d’effectifs (199 seuils répartis en 49 niveaux pour les PME) et trop d’obligations y sont liées, ce qui freine la croissance des entreprises ;
  • la création d’entreprise reste complexe (39% de créations en ligne) et le rebond est entravé par les durées de certaines procédures collectives (par exemple 2 an et demi en moyenne pour les liquidations judiciaires) ;
  • les PME françaises ne sont pas assez tournées vers l’export : 125 000 PME françaises sont exportatrices, contre 220 000 PME italiennes et 310 000 PME allemandes ;
  • l’intéressement et la participation des salariés des PME ne sont pas assez développés car seuls 16% des salariés de ces entreprises sont couverts par au moins un dispositif d’épargne salariale ;
  • l’épargne ne finance pas assez l’investissement et la croissance des entreprises car seulement 11% sont alloués aux fonds propres ;
  • enfin, l’assurance-vie représente un encours total de 1 700 Md€ (dont 1 400 Md€ en fonds) mais seulement 20% sont investis en actions.

➢ Pour trouver les meilleures réponses à ces constats : un processus de co-construction innovant

Le Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE) a été lancé le 23 octobre 2017 dans le cadre d’un processus de co-construction innovant : une large consultation a été menée notamment par des binômes, réunissant des élus et des membres de la société civile (en particulier issus du monde de l’entreprise) avec l’ensemble des acteurs (régions, parlementaires, CESE, associations professionnelles, syndicats).
Les élus LaREM ont joué un rôle clé dans ce processus en organisant plusieurs dizaines de réunions, notamment locales, en prenant appui sur l’intelligence collective pour faire émerger les solutions les plus efficaces afin de permettre aux entreprises françaises de déployer leur potentiel.
Les premières pistes et propositions des binômes ont été remises lors d’une réunion à Bercy le 21 décembre 2017. 626 entreprises et 38 organisations (syndicats et fédérations professionnelles) ont été rencontrées. Le 15 janvier 2018, une consultation publique en ligne a été lancée jusqu’au 5 février 2018 : en 3 semaines de consultation, elle a enregistré plus de 7 700 participants, plus de de 63 000 votes et plus de 12 800 contributions.
Plusieurs mesures du projet de loi font également suite aux propositions du rapport « L’entreprise, objet d’intérêt collectif »3 de Jean-Dominique SENARD et Nicole NOTAT, remis à Bruno LE MAIRE le 9 mars dernier.

➢ Des objectifs et des mesures à la hauteur des constats et des enjeux

L’objectif annoncé par Bruno LE MAIRE en octobre 2017, au début du processus PACTE : coconstruire, avec les principaux acteurs, un projet de loi utile pour renforcer le tissu productif français, donner aux entreprises (et notamment aux TPE-PME) le cadre et les leviers pour innover, se transformer, grandir et créer des emplois.
D’après une étude du Trésor, le projet de loi PACTE pourrait faire augmenter le PIB d’1 point à long terme, dont 0,4 point à horizon 2025.


Analyse du texte

CHAPITRE I : DES ENTREPRISES LIBEREES
SECTION 1 : CREATION FACILITEE ET A MOINDRE COUT
ARTICLE 1 : Création d’un guichet unique électronique pour l’accomplissement des formalités liées à la création et à la vie
des entreprises

Actuellement, les entreprises sont tenues d’accomplir les formalités lors de leur création, de la modification de leur situation et de la cessation de leur activité auprès des centres de formalités des entreprises (CFE). Il existe 7 réseaux de CFE gérés notamment par les chambres de commerce et d’industrie (CCI), les chambres de métiers et de l’artisanat (CMA) et les chambres d’agriculture. Ces structures sont multiples, avec l’existence d’environ 1 400 CFE, ce qui constitue une complexité pour les entreprises et des coûts de gestion importants. Ces quelque 1 400 CFE traitent près de 3 millions de formalités par an, dont environ 30% concernent la création, 55% la modification et 15% la radiation.
Cet article prévoit de substituer aux différents réseaux de CFE un guichet unique électronique collectant l’ensemble des informations et des pièces nécessaires pour le dossier de formalités et devant constituer l’interface entre les destinataires des informations collectées et les entreprises. Pour permettre l’adaptation des acteurs à ce changement, son entrée en vigueur est prévue le 1er janvier 2021.

ARTICLE 2 : Création d’un registre des entreprises

Les registres et répertoires relatifs aux entreprises sont destinés à identifier les personnes physiques ou morales qui exercent une activité et à diffuser ces informations. Il existe de multiples registres et répertoires, ce qui peut être redondant, générer des coûts et des démarches inutiles.
Le présent article habilite le Gouvernement à créer, par voie d’ordonnance, un registre dématérialisé des entreprises ayant pour objet de centraliser et de diffuser les informations les concernant. Celui-ci se substituera à tout ou partie des répertoires et registres nationaux d’entreprises existants, sans pour autant remettre en cause les attributions des officiers publics et ministériels. L’article habilite également le Gouvernement à simplifier les obligations déclaratives les modalités de contrôle.

ARTICLE 3 : Réforme des publications d’annonces légales

L’article 3 vise à simplifier et moderniser le dispositif d’inscription des journaux habilités à publier des annonces judiciaires et légales (AJL). Les AJL répondent à un enjeu d’information et de transparence pour les citoyens sur la vie des entreprises. En 2017, 580 publications étaient habilitées à publier des AJL. Près de 1,3 millions d’annonces sont publiées chaque année.
Cet article prévoit notamment d’ouvrir la publication des AJL aux services de presse en ligne, la suppression des habilitations par arrondissements et l’extension de la tarification au forfait des AJL, avec un objectif de baisse des coûts pour les entreprises et les collectivités. Par exemple, une diminution du coût des AJL de 10 % se traduirait par une réduction de 18,5 M€ en 5 ans du coût pour les entreprises.

ARTICLE 4 : Suppression de l ’obligation de suivre le stage de préparation à l’installation

Aujourd’hui, le futur chef d’entreprise artisanale a pour obligation de suivre (auprès du réseau des CMA) un stage de préparation à l’installation (SPI) d’une durée de 30 heures afin de s’immatriculer au répertoire des métiers. Ce stage dure en moyenne 5 jours, représente un coût non négligeable (400€ à 500€ en moyenne) et peut donc retarder le début de l’activité. Il est donc proposé de supprimer cette obligation et d’harmoniser les conditions de ce stage avec le stage d’initiation à la gestion organisé par les CCI pour les commerçants.

ARTICLE 5 : Mise en œuvre d’actions collectives de communication et de promotion à caractère national en faveur de l ’artisanat et des entreprises artisanales

Le Fonds national de promotion et de communication de l’artisanat (FNPCA) est un établissement public administratif. La taxe fiscale affectée (TFA), qui l’alimentait, a été supprimée le 1er janvier 2018 afin de réduire les prélèvements obligatoires.
Pour remplacer cette ressource et permettre la continuité des actions du FNPCA, il est proposé de créer un dispositif qui s’inspire du régime des contributions volontaires obligatoires (CVO) du domaine agricole et de celui des contributions obligatoires admises dans le cadre d’accords collectifs relatifs au développement du dialogue social dans l’artisanat. Il reposera sur une contribution privée, portée par un organisme privé.


SECTION 2 : SIMPLIFIER LA CROISSANCE DE NOS ENTREPRISES
ARTICLE 6 relatif aux seuils d’effectifs

Les nombreux seuils d’effectifs et les faibles délais pour y répondre ralentissent les embauches dans les PME. En effet, il existe actuellement 199 seuils ainsi répartis :


L’article 6 engage une harmonisation du mode de calcul des effectifs, introduit une règle selon laquelle un seuil d’effectif est franchi uniquement lorsqu’il a été atteint pendant 5 années consécutives, supprime ou relève plusieurs seuils dont celui de 20 salariés (sauf le seuil d’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH)) et rationnalise les seuils d’effectif en les regroupant progressivement autour des niveaux de 11, 50 et 250 salariés. Également, cet article clarifie le fait que le franchissement à la baisse d’un seuil d’effectif sur une année aura pour effet de revenir à la situation précédente.
Dans le cadre du PLF pour 2019, des mesures relevant du code général des impôts viendront compléter l’harmonisation et la simplification des seuils prévues par cet article.

ARTICLE 7 : Adaptation de la gouvernance de Business France dans le cadre de la réforme du dispositif d’accompagnement à l’export

Le Premier ministre a annoncé, le 23 février 2018, une réforme du dispositif d’accompagnement à l’export, conduisant notamment à le restructurer et rationnaliser. Notamment, il a été décidé de mettre à disposition des régions un guichet unique, réunissant l’agence Business France et les chambres de commerce et d’industrie (CCI), dont la mission sera d’identifier et de préparer les entreprises à l’export, notamment les primo-exportateurs. A l’étranger, la mission sera également confiée à un opérateur unique.
Le présent article s’inscrit dans cette réforme globale et vise à modifier la gouvernance de Business France dont le conseil d’administration (CA) compte aujourd’hui 22 membres, ce qui ne parait pas adapté à une telle structure. Il resserre donc le conseil d’administration en faisant sortir du CA les deux parlementaires et les représentants des organisations professionnelles et des réseaux consulaires.

ARTICLE 8 : Passage de la durée des soldes de 6 à 4 semaines

A l’automne 2017, le Ministre de l’Économie et des Finances a engagé une concertation avec les représentants du commerce. Il est ressorti de cette concertation que la majorité des représentants des professionnels souhaitait une réduction de la durée des deux périodes de soldes, afin de renforcer leur impact et de concentrer les réductions de prix sur un temps plus court. La durée des périodes de soldes, jusqu’alors fixée à six semaines, sera donc désormais comprise entre trois et six semaines mais le présent article renvoie à un arrêté le soin de déterminer, dans ces limites, sa durée exacte. Cet arrêté fixera la durée à 4 semaines. La fixation par arrêté apportera notamment davantage de souplesse et d’adaptabilité aux commerçants.

ARTICLE 9 : Relèvement des seuils de certification légale des comptes

Le présent article s’inscrit dans le cadre des objectifs du Gouvernement visant à alléger les contraintes pesant sur les entreprises et à les aligner sur les exigences du droit européen des affaires. Actuellement, les sociétés anonymes (SA) et les sociétés en commandite par actions (SCA) sont tenues de désigner un commissaire aux comptes dans tous les cas, à la différence des autres formes de sociétés commerciales, qui ont cette obligation que lorsqu’elles dépassent une certaine taille. Les nouveaux seuils seront définis en fonction du chiffre d’affaires, du total du bilan et du nombre de salariés. Un décret les fixera et harmonisera le niveau des seuils pour les autres formes sociales au niveau des seuils européens de référence (4 M€ de bilan, 8 M€ de chiffre d’affaires et 50 salariés).
D’après la mission de l’IGF, il existe actuellement environ 120 000 mandats concernant les entreprises situées au-dessus des seuils, mais en dessous des seuils européens de référence. L’impact de la mesure consisterait en un allégement de coût pour les petites entreprises d’environ 600 M€. Cet article introduit également une disposition imposant aux sociétés qui contrôlent d’autres sociétés de désigner un commissaire aux comptes en fonction de la taille de l’ensemble formé par la société mère et ses filiales. La règle spécifique aux sociétés par actions simplifiées (SAS), imposant la désignation d’un commissaire aux comptes dès lors que la société est liée à une autre par un lien de contrôle, sera supprimée.

ARTICLE 10 : Accompagnement de la réforme territoriale de l’ordre des experts- comptables

Cet article prévoit notamment la réduction du nombre des conseils régionaux de l’ordre des experts comptables (CROEC), afin de les aligner sur les régions définies par la loi de 2015 relative à la délimitation des régions. Le nombre de CROEC passera ainsi de 23 à 16 et le nombre d’élus sera réduit en conséquence. Cet article fixe également les conditions de transfert et biens et les règles de l’organisation des élections et la composition future des instances.

ARTICLE 11 : Radiation des fichiers, registres et répertoires des entrepreneurs individuels ayant réalisé pendant deux années civiles consécutives un chiffre d’affaires nul

Afin de faciliter les démarches des entrepreneurs individuels et simplifier la fin d’activité, cet article supprime la nécessité pour l’entrepreneur individuel de déposer une déclaration de cessation d’activité auprès du CFE en cas d’absence de chiffre d’affaires ou de recettes ou de déclaration de revenus pendant deux années consécutives. L’entrepreneur individuel pourra s’opposer à cette radiation, dans un délai fixé par décret, après en avoir été informé.

ARTICLE 12 : Suppression de l’obligation d’un compte bancaire dédié pour les micro-entrepreneurs dégageant un chiffre d’affaires annuel inférieur à 5 000 €

Cet article s’inscrit également dans la logique de simplification des démarches en cas de création et de poursuite d’activité. Il supprime l’obligation d’un compte bancaire dédié à l’activité professionnelle pour les micro-entrepreneurs réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 5 000 € annuels. L’obligation ne sera appliquée que si le micro-entrepreneur dépasse ce seuil pendant deux années civiles consécutives.

ARTICLE 13 : Modernisation du réseau des chambres de commerce et d’industrie (C C I)

Les CCI assurent des missions d’intérêt général en contribuant au développement économique et à l’attractivité des territoires. Pour mieux assurer ces services, le présent article vise à offrir aux CCI plus d’agilité et de flexibilité notamment en définissant mieux les prestations gratuites ou donnant lieu à des redevances et en les complétant par une offre plus claire de services payants.
De plus, 90% des employés des CCI sont, aujourd’hui, des agents de droit public soumis à un statut datant de 1952. Pour mieux répondre aux nouveaux enjeux, notamment numériques, de leurs missions, les CCI pourront désormais recruter plus facilement des personnels de droit privé. Enfin, cet article contient des mesures de simplification, notamment du processus électoral des membres des CCI.


SECTION 3 : FACILITER LE REBOND DES ENTREPRENEURS ET DES ENTREPRISES

ARTICLE 14 : Fixation de la rémunération du dirigeant en redressement judiciaire

Le déclenchement des procédures de redressement et de liquidation judiciaires suit la constatation de cessation des paiements. Les dirigeants d’une société en redressement judiciaire demeurent en fonction. Actuellement, il est prévu que le juge-commissaire doit systématiquement fixer « la rémunération afférente aux fonctions exercées par le débiteur s’il est une personne physique ou les dirigeants de la personne morale ». Cette situation peut être améliorée en laissant l’administrateur décider d’enclencher ou non cette procédure selon son appréciation. Cela peut limiter les situations de défiance ou d’atteinte à l’honneur ou à la réputation du dirigeant tout en permettant de sécuriser la procédure en cas de rémunérations excessives.
Le présent article vise donc à ne plus rendre obligatoire la fixation par le juge-commissaire de la rémunération afférente aux fonctions exercées par le débiteur. Sauf décision contraire, sa
rémunération sera donc maintenue.

ARTICLE 15 : Rétablissement professionnel et liquidation judiciaire simplifiée

L’objectif du présent article est de permettre au plus grand nombre de débiteurs, notamment les plus petits, de bénéficier d’une procédure de liquidation judiciaire rapide et simplifiée (procédure plus courte que les autres et allégée, notamment en ce qui concerne la vérification des créances et la vente des biens) favorisant un rebond rapide de l’entrepreneur, dès la clôture de la procédure s’il s’agit d’un entrepreneur individuel. En effet, aussi longtemps que la procédure n’est pas clôturée, le débiteur ne peut reprendre la plupart des activités, en particulier lorsqu’il est une personne physique. La procédure de liquidation simplifiée sera donc obligatoire pour les PME employant 5 salariés au maximum et réalisant moins de 750 000 € de chiffre d’affaires. En ce qui concerne le rétablissement professionnel, le tribunal devra désormais s’interroger systématiquement sur l’opportunité de faire bénéficier de cette procédure un débiteur personne physique qui répond à certaines conditions et qui donne son accord.

ARTICLE 16 : Habilitation du Gouvernement à réformer par voie d’ordonnance le droit des sûretés

Les sûretés sont des mécanismes destinés à permettre à un créancier de se prémunir contre le risque de non-paiement ou inexécution des obligations par le débiteur. En 2006, une profonde rénovation du droit des sûretés avait été réalisée, toutefois certaines parties avaient été exclues, comme par exemple le cautionnement, qui est pourtant la sûreté la plus souvent pratiquée. L’objectif de cette habilitation à réformer par voie d’ordonnance est de clarifier la lisibilité du droit des sûretés, dans un souci de sécurité juridique, ainsi que de renforcer son efficacité, afin de faciliter le crédit. Par exemple, via une harmonisation des modalités de publicité de sûretés mobilières. La mesure vise également à assurer l’équilibre entre les intérêts des créanciers, titulaires ou non de sûretés, et ceux des débiteurs et des garants.

ARTICLE 17 : Publicité du privilège du Trésor

Afin de garantir pleinement le recouvrement de ses créances, le Trésor public bénéficie d’un privilège qui s’exerce sur tous les biens meubles appartenant à ses débiteurs. Il est ainsi procédé à l’envoi d’un bordereau de publicité au greffe du tribunal de commerce ou de grande instance, lorsque les sommes dues par un même redevable sont supérieures ou égales à 15 000 €. Cette publicité est effectuée sur un calendrier glissant qui peut être incertain pour l’entreprise.
L’objet du présent article est donc de faciliter le rebond des entreprises en difficultés en sécurisant le dispositif de publicité. Les dates de publicité du privilège du Trésor seront désormais fixes et une exception supplémentaire à la publicité sera créée en cas de dépôt par le redevable d’une réclamation d’assiette régulière, assortie d’une demande de sursis de paiement.

ARTICLE 18 : Traitement des créances publiques en procédure collective

Le présent article précise les délais devant être respectés par le comptable public pour émettre son titre définitif, sans rallonger les délais de la procédure collective en cours. Il est donc prévu un délai maximum de 12 mois en cas d’établissement de l’impôt uniquement pour les procédures de redressement et de sauvegarde, ou à la date butoir du dépôt par le mandataire de son compte rendu dans le cas d’une procédure de contrôle ou de rectification de l’impôt.

ARTICLE 19 : Clauses de solidarité dans les baux commerciaux

Les clauses de solidarité stipulées dans les contrats de baux, en particulier les baux commerciaux, peuvent faire obstacle à la reprise de l’entreprise en procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. Le présent article propose donc de réputer non écrite, en plan de cession, toute clause d’un contrat de bail imposant au cessionnaire des dispositions solidaires avec le cédant.


CHAPITRE II : DES ENTREPRISES PLUS INNOVANTES

SECTION 1 : AMELIORER ET DIVERSIFIER LES FINANCEMENTS

Sous-section 1 : Mesures en faveur du financement des entreprises par les acteurs privés

ARTICLE 20 : La réforme de l’épargne retraite

L’épargne retraite est la constitution d’un capital par le versement de sommes en vue de la retraite de l’épargnant. L’épargne réalisée est alors reversée à la retraite sous forme d’une rente viagère ou d’un capital. Le dispositif souffre de plusieurs problèmes : montant peu élevé, mal compris par les épargnants, soumis à des règles complexes et peu portable. Il représente plus de 200 Md€.

Cet article vise à réformer l’épargne retraite, en :

  • offrant de meilleures perspectives de rendement aux épargnants. Majoritairement investis dans des actifs peu adaptés à l’épargne de long terme, elle offre aujourd’hui peu de rendement. Il est ainsi proposé de faire de la généralisation de la gestion pilotée l’option par défaut, afin d’orienter cette épargne vers l’économie productive pour offrir de meilleurs rendements aux futurs retraités ;
  • améliorant son attractivité. Alors qu’aujourd’hui un épargnant peut se trouver contraint de cumuler plusieurs produits au cours de sa carrière, les règles auxquelles ils répondent seront harmonisées afin de permettre l’éventuelle transférabilité des encours. Les conditions de sortie de ces produits au moment de la retraite seront assouplies et alignées. Les possibilités
    de libérer l’épargne sous la forme d’un capital, plutôt que sous forme de rente, seront accrues. Les versements obligatoires seront liquidés sous la forme d’une rente viagère, et les versements volontaires ou issus de l’épargne salariale au choix de l’épargnant entre rente viagère et capital. La sortie par anticipation sera également facilitée ;
  •  protégeant les Français qui épargnent en vue de la retraite en cas de défaillance de l’entreprise d’assurance, en généralisant l’obligation de cantonner comptablement les engagements de retraite ;
  • stimulant la concurrence. De nouveaux acteurs, les gestionnaires d’actifs, pourront proposer des produits d’épargne retraite, afin d’exercer une pression à la baisse sur les frais pratiqués et enrichir l’offre proposée aux épargnants. Les acteurs du monde de l’assurance pourront proposer des garanties complémentaires dans tous les produits.

Article 21 : Différentes mesures pour renforcer le rôle de l’assurance-vie dans le financement de l’économie

Seulement 20% de l’épargne des Français placée en assurance-vie est investie en actions, et le rendement moyen des contrats d’assurance-vie en fonds euros s’est élevé à 1,8% en 2017. Il importe donc de renforcer la contribution de l’assurance-vie au financement de l’économie tout en offrant à l’épargnant, en fonction de ses besoins, des possibilités élargies d’investissement.
Pour ce faire, l’article modernise les caractéristiques des contrats Eurocroissance, support intermédiaire entre le fonds euro et les unités de compte, dédié à l’investissement à horizon de moyen terme et offrant une perspective de rendement plus élevée. Il sera simplifié et rendu plus lisible par l’affichage d’un rendement unifié pour tous les épargnants. Il pourra être bonifié par des engagements d’investissement plus longs. La garantie du capital à l’échéance du contrat sera maintenue. L’assurance-vie en unité de compte est également modernisée afin d’accroître sa contribution au financement du capital-investissement en France : les modalités de paiement en titres sont simplifiées, et la possibilité est ouverte pour des particuliers d’investir dans des fonds professionnels. Par ailleurs, l’article participe aussi à lutter contre l’optimisation agressive et la fraude fiscale, via des mesures concernant le paiement de la prime du contrat à l’entrée et de sa valeur de rachat en sortie.

Article 22 : Simplification de l’accès des entreprises aux marchés financiers

Cet article prévoit en premier lieu un rehaussement du seuil d’établissement du prospectus pour les opérations d’un montant supérieur à 8 M€, soit le montant le plus élevé permis par règlement européen « Prospectus 3 », tout en supprimant la condition relative à la majorité du capital de l’émetteur et le plafond des offres de financement participatif qui relèvent de surtransposition. Un document d’information minimal pour les investisseurs en l’absence de prospectus est également créé.

Il est en deuxième lieu prévu un abaissement du seuil de retrait obligatoire concernant les offres publiques d’acquisition (OPA). La France avait choisi l’option maximale proposée par la directive concernée, soit 95%, quand la plupart des autres pays européens ont aujourd’hui adopté l’option de 90%. Certains émetteurs pourraient être tentés de transférer ou installer le lieu de leur cotation dans ces pays. Il s’agit donc de faciliter la cotation en envoyant un signal rassurant pour les émetteurs par l’abaissement du seuil de retrait obligatoire.
Il est également prévu d’améliorer l’accessibilité du droit des sociétés. Une division spécifique du code du commerce sera consacrée aux sociétés cotées, et certaines dispositions issues de la législation européenne relative aux marchés financiers seront transférés dans le code monétaire et financier. En outre, il est proposé d’habiliter le Gouvernement à réformer le droit français des offres au public de titres financiers afin de procéder à une clarification et à une désurtransposition du droit rendue nécessaire par le règlement européen avant le 21 juillet 2019.

Article 23 : Renforcement de l’attractivité de la Place de Paris

L’article 23 vise à renforcer l’attractivité de la place financière de Paris en simplifiant le cadre réglementaire pour les entreprises internationales et leurs salariés travaillant en France et en l’harmonisant avec les normes européennes. Le contrat cadre de de l’association internationale des Swaps et Dérivés (ISDA), document de référence pour des opérations de vente ou d’achat de produits dérivés, est aujourd’hui principalement rédigé en droit britannique. En raison du Brexit, il est proposé de développer ce contrat en droit français. Il est proposé d’instaurer une dispense de trois ans, renouvelable une fois, pour les cotisations à l’assurance vieillesse pour les impatriés n’ayant pas été affilié en France au cours des cinq dernières années et déjà affilié à un régime d’assurance, afin de favoriser la mobilité professionnelle. En effet, quand ils ne sont là que pour quelques années, les travailleurs impatriés cotisent pour une retraite dont ils ne bénéficieront pas.
Les primes et bonus récupérables des salariés « preneurs de risques » seront exclus du calcul des indemnités de rupture de contrat de travail. Ils étaient jusqu’à présent comptabilisés dans le calcul de l’indemnité de rupture du contrat de travail, générant des coûts importants pour les entreprises.

L’article propose également :

  • une adaptation du régime des succursales d’entreprises d’investissement de pays tiers ;
  • d’élargir les modes de négociation des titres de créances négociables au vu de l’émergence de plusieurs initiatives privées fondées sur ces plateformes alternatives de négociation dans l’objectif de la création d’un marché secondaire ;
  • dans le cadre des premiers mois de mise en œuvre de la directive MIFID2, d’apporter certaines clarifications au cadre d’action de l’autorité des marchés financiers, et aux obligations incombant aux entreprises ;
  • de procéder à une modernisation du cadre de la gestion d’actifs, en mettant en conformité le cadre législatif français au regard des textes européens concernant les dispositifs de cantonnement des actifs illiquides, possibles dans des circonstances exceptionnelles, lorsque la cession de certains actifs d’un organisme de placement collectif ne serait pas conforme à l’intérêt des porteurs de parts ou actionnaires ;
  • d’adapter le régime des organismes de financement spécialisé, appelés à devenir les véhicules privilégiés de financement en dette et en capital, suite aux évolutions juridiques récentes (recouvrement de créances, dispositif d’offre au public, régime dépositaire, plan comptable).

Article 24 : La modernisation des pouvoirs de l’Autorité des marchés financiers

Cet article a pour objet de préciser, à la suite de la censure du Conseil constitutionnel du 21 juillet 2017, le cadre juridique de l’exploitation des données de connexion par l’Autorité des marchés financiers au cours de ses enquêtes, afin de concilier l’efficacité de ses investigations avec la protection du droit à la vie privée. Le niveau de garantie offert sera renforcé en soumettant les demandes d’accès aux données de connexion à l’autorisation préalable d’un contrôleur des données de connexion et en limitant le recours à ces données aux manquements les plus graves.

Article 25 : Infrastructures de marché

Cet article propose de faire bénéficier certains systèmes de paiement spécifiques et systémiques établis dans un pays tiers des protections apportées par la Directive Finalité (98/26). L’obligation d’obtenir le statut d’établissement de crédit pour une chambre de compensation devient en partie optionnelle et l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) est désigné comme autorité compétence sur les chambres de compensation. La liste des entités pouvant participer à une chambre de compensation et à un système de règlement interbancaire et de règlement livraison d’instruments financiers est élargie.

Article 26 : La création d’un régime français des offres de jetons

Une ICO (Initial Coin Offering – ou « offre de jetons ») est une méthode de levée de fonds, fonctionnant via l’émission d’actifs numériques échangeables contre des cryptomonnaies durant la phase de démarrage d’un projet. Ces jetons ne représentent pas des parts de l’entreprise mais ont ensuite vocation à être utilisables dans le projet financé par l’ICO en question. Leur valeur est donc censée dépendre du service fourni in fine par l’entreprise à l’origine de l’ICO. Les ICO se sont développés de manière spectaculaire au cours de l’année 2017. Pour autant, l’absence d’un cadre juridique clair conduit à placer tous les types d’émetteurs sur le même plan et empêche de distinguer les offres sérieuses de celles frauduleuses. Ainsi, il est proposé de permettre à l’AMF de donner un visa facultatif aux entreprises émettrices de jetons respectant certains critères précis de nature à protéger les épargnants. Pour l’obtenir, l’AMF pourra exiger que les émetteurs se dotent d’un statut de personne morale, qu’ils mettent en place un mécanisme de séquestre des fonds recueillis et un dispositif d’identification et de connaissance du client. La liste constituera un repère précieux pour les investisseurs.

Article 27 : Elargissement des instruments éligibles au PEA -PME

Les encours du PEA-PME restent aujourd’hui relativement faibles, du fait de la forte contrainte d’investissement quant aux titres qui y participent, et à un univers d’investissement réduit. Il est donc proposé, afin de renforcer son attractivité et ainsi l’investissement dans nos entreprises, d’introduire dans les PEA-PME, en plus des titres de capital des PME-ETI, les autres titres proposés sur les plateformes de financement participatifs, tels que les titres participatifs, les obligations à taux fixe et les minibons.

Article 28 : Développer l’émission d’actions de préférence

Les actions de préférence sont des titres de capital, avec ou sans droit de vote, assortis de droits particuliers de toute nature, à titre temporaire ou permanent. Elles peuvent être émises par toute société par actions : société anonyme (SA), société en commandite par actions (SCA) et société par actions simplifiées (SAS).

Cet article sécurise et modernise le régime juridique des actions de préférence, afin d’en permettre le développement. Cela passe notamment par la création d’actions de préférence à droit de vote multiple, l’assouplissement de la création d’actions de préférence à droit de vote double, et la clarification du champ de la procédure des avantages particuliers, qui impose notamment en cas d’émission la désignation d’un commissaire aux apports, afin de préciser qu’elle s’applique non seulement aux actionnaires existants, mais aussi aux personnes qui le deviennent au moment de la souscription.

Article 29 : Amélioration du dispositif Entreprise solidaire d’utilité sociale (ESUS)

L’article 29 vise à simplifier et préciser les conditions d’accès à l’agrément entreprise solidaire d’utilité sociale (ESUS) afin d’encourager le financement d’entreprises de l’économie sociale et solidaire (ESS) qui recherchent un fort impact social.

Afin d’y parvenir :

  • la notion d’utilité sociale sera explicitée, de façon à mieux affirmer et faciliter l’éligibilité à l’agrément ESUS, notamment pour les entreprises ayant des activités liées à la transition écologique, à la promotion culturelle ou à la solidarité internationale ;
  • les modalités de justification de l’impact des activités d’utilité sociale sur le modèle économique des entreprises candidates à l’agrément ESUS seront clarifiées et simplifiées ;
  • l’encadrement de la rémunération appliqué à l’ensemble des entreprises éligibles à l’agrément sera harmonisé ;
  • la dématérialisation de la procédure de demande d’agrément ESUS sera mise en place pour accélérer l’instruction.

Sous-section 2 : Moderniser la gouvernance de la Caisse des dépôts et consignations pour améliorer ses actions en faveur des territoires

La seconde sous-section vise à moderniser la gouvernance de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) pour améliorer ses actions en faveur des territoires, autour de 4 grands axes :

  • l’évolution de la composition de la Commission de surveillance ;
  • le renforcement des prérogatives de cette instance comme organe délibérant ;
  • la modernisation du cadre comptable et prudentiel de la CDC, incluant la supervision de l’établissement par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ;
  • la clarification des relations financières entre l’Etat et la CDC.

Article 30 : La composition de la commission de surveillance

L’article 30 vise à moderniser la composition de la Commission de surveillance de la CDC, en lien avec l’accroissement des prérogatives de cette instance prévu par l’article 35. Cela se traduit par :

  • l’élargissement aux commissions des affaires économiques de l’Assemblée nationale et du Sénat de la capacité de désigner des parlementaires au sein de la Commission de surveillance ;
  • le remplacement des représentants de droit des corps de contrôle (Cour des comptes, Conseil d’Etat) et de la Banque de France par quatre personnalités qualifiées désignées par l’Etat, à raison de leurs compétences dans les domaines financier, comptable et économique ou dans celui de la gestion ;
  • l’ajout de deux représentants des salariés, faisant passer le nombre total de membres de 13 à 15.

Article 31 : Renforcement du rôle de la commission de surveillance

Cet article vise à renforcer les prérogatives de la Commission de surveillance, et donc du Parlement, sur la CDC, tout en rapprochant celle-ci des meilleurs standards en matière de gouvernance
d’entreprise. Alors qu’il est aujourd’hui essentiellement d’ordre consultatif, il est proposé de renforcer son pouvoir délibératif sur les grandes décisions ayant trait à la gouvernance de  l’établissement, et de charger la Commission d’approuver les comptes, du contrôle permanent de gestion, de l’approbation du cadre du contrôle interne et de la politique de l’établissement sur les questions d’égalité femme-homme.

Cet article confie également au Directeur général des prérogatives nouvelles de nomination sur ses services qui traduisent une volonté de modernisation et de normalisation du fonctionnement
interne de la CDC.

Article 32 : Prérogatives du Directeur général

Cet article confie au Directeur général des prérogatives nouvelles de nomination sur ses services qui traduisent une volonté de modernisation et de normalisation du fonctionnement interne de la
CDC. Les dispositions figurant dans la partie règlementaire du code monétaire et financier prévoyant la désignation des cadres de la CDC par décret seront également actualisées en ce sens.

 

Articles 33 et 34 : Modernisation d u cadre comptable de la CDC

Ces articles visent à moderniser le cadre comptable de la CDC, afin de le rapprocher du droit commun. Cette évolution, qui vise à conférer plus de souplesse à la gestion de la CDC, poursuit le
même objectif d’efficacité que le renforcement des compétences de la Commission de surveillance. Suivant les recommandations de la Cour des comptes, il est ainsi proposé la suppression de la caisse générale et de rendre applicables à la CDC les règles de la comptabilité commerciale. Les dispositions relatives aux prérogatives des commissaires aux comptes font également l’objet d’un alignement avec les meilleures pratiques en matière de gouvernance d’entreprise.

Article 35 : La supervision prudentielle de la Caisse des dépôts et consignations par l’AC PR

Cet article soumet la Caisse des dépôts et consignation au contrôle de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Cette évolution est rendue nécessaire par le renforcement des
compétences de la Commission de surveillance comme organe délibérant, celle-ci ne pouvant à la fois se prononcer sur la stratégie et la gestion de l’établissement et en assurer la supervision
prudentielle. Elle renforcera la protection des fonds dont la CDC assure la gestion et apportera des garanties accrues sur la solidité de son modèle économique. La supervision de l’ACPR s’exercera dans un cadre prenant en compte les spécificités de la CDC.

Article 36 : La détermination du versement

Cet article clarifie les relations financières entre la CDC et l’Etat s’agissant des modalités de fixation du versement. La détermination de son montant continuera à donner lieu à un avis de Commission de surveillance, qui conservera ainsi la pleine faculté de se prononcer sur le versement, avant qu’il ne soit définitivement fixé par décret.

Article 37 : L’encadrement des missions de mandataire de la Caisse des dépôts et consignations

Cet article introduit un nouvel article au code monétaire et financier permettant de préciser le cadre juridique au sein duquel la CDC peut se voir confier par des personnes publiques la gestion de leurs fonds et mener les opérations qui y sont relatives.

Article 38 : Contrôle juridictionnel de la Cour des comptes

Cet article prévoit la suppression des dispositions relatives au contrôle juridictionnel exercé par la Cour des comptes sur l’établissement, en articulation avec les évolutions relatives au caissier
général.

Article 39 : Dispositions transitoires

Cet article précise le calendrier d’application des dispositions introduites. Il est ainsi proposé de prévoir un délai d’entrée en vigueur, fixé au 1er janvier 2020, pour les dispositions relatives à
l’évolution de la composition de la Commission de surveillance et celles relatives à l’application du principe de parité. S’agissant de la suppression du caissier général et de l’évolution du cadre
comptable de la CDC, il est proposé de rendre ces dispositions applicables au 1er janvier 2020, afin de poursuivre dans le cadre juridique actuel l’exécution de l’exercice comptable en cours.


SECTION 2 : PROTEGER LES INVENTIONS ET L’EXPERIMENTATION DE NOS ENTREPRISES

Sous-section 1 : Protéger les inventions de nos entreprises

Article 40 : La création d’une demande provisoire de brevet et à la modernisation du certificat d’utilité

Le formalisme et le coût du système de dépôt de brevet, notamment comparé à d’autres pays tels que l’Allemagne ou la Chine, peuvent conduire les créateurs d’entreprise à ne pas protéger leurs inventions. Il est donc être pertinent de faire évoluer les procédures du système français de propriété industrielle vers des voies d’accès plus souples et plus progressives.

Cet article crée ainsi une demande provisoire de brevet, en permettant aux entreprises d’effectuer un dépôt auprès de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) à moindre coût et avec un minimum de formalités. Il renforce de plus l’attractivité du certificat d’utilité en alignant la protection qu’il offre sur celle des titres analogues en vigueur en Allemagne ou en Chine, ainsi qu’en permettant sa transformation en demande de brevet d’invention.

Article 41 : Chercheurs entrepreneurs 

La collaboration entre recherche publique et entreprises est une composante essentielle de la compétitivité et du dynamisme de nos entreprises. Or, les dispositifs de collaboration des personnels de la recherche avec les entreprises n’ont pour l’instant pas atteint leur plein potentiel.

Il est donc proposé de faire évoluer les dispositions du code de la recherche pour adapter les dispositifs à la diversité des situations rencontrées par les personnels de la recherche, faciliter la fluidité entre les différents dispositifs qui sont jugés aujourd’hui peu lisibles et trop rigides par la communauté ainsi que les passerelles publics-privés tout en veillant au respect des droits et
obligations des fonctionnaires et des règles de déontologie.

 

Article 42 : Création d’une procédure d’ opposition aux brevets d’invention

Alors qu’en France la nullité d’un brevet d’invention ne peut être prononcée que dans le cadre d’une procédure judiciaire, de nombreux offices de propriété industrielle ont mis en place un système d’opposition, offrant une possibilité de recours administratif contre les titres délivrés.

L’article habilite donc le Gouvernement à créer, par voie d’ordonnance, un droit d’opposition aux brevets d’invention délivrés par l’Institut national de la propriété industrielle (INPI). Ce droit permettra à toute personne de demander à l’INPI, dans un certain délai, la révocation d’un brevet délivré, notamment au regard du critère d’activité inventive.


Sous-Section 2 – Protéger les expérimentations de nos entreprises

Article 43 : Véhicules autonomes

Le présent article révise le cadre législatif de l’expérimentation prévue pour les véhicules autonomes, afin d’intégrer l’avis du Conseil d’Etat, et surtout d’élargir les critères (voies autorisées, catégories de conducteurs, d’engins).
L’expérimentation constitue un point de passage obligé pour permettre un développement sûr du véhicule autonome : l’accumulation d’expériences (« learning by doing ») permet en effet de préciser les enjeux de sécurité et de définir le cadre réglementaire et normatif adapté, notamment pour la validation ou l’homologation de ces systèmes.


SECTION 3 : FAIRE ÉVOLUER LE CAPITAL ET LA GOUVERNANCE DES ENTREPRISES PUBLIQUES ET FINANCER L’INNOVATION DE RUPTURE

Articles 44 à 50 : Transfert de la majorité du capital d’Aéroports de Paris (ADP) au secteur privé

La société ADP a réalisé en 2017 un chiffre d’affaires consolidé de 3 617 M€ et un résultat net part du groupe de 571 M€. Elle a accueilli près de 102 M de passagers dans ses plateformes parisiennes (Paris-CDG et Paris-Orly), emploie directement près de 9 000 personnes et a consacré en 2017 de l’ordre de 900 M€ à ses investissements.

ADP a été transformée en société anonyme en 2005. Depuis, elle a connu une augmentation annuelle de 2,1% du trafic de ses plateformes parisiennes, de 3,8% de ses revenus et de 10% de son résultat, et s’est particulièrement développée à l’international. L’Etat détient aujourd’hui 50,63% du capital, soit une participation d’une valeur d’environ 8,8 Md€. Cela lui permet d’avoir 58,5% des droits de vote. Via les articles 44 à 50, le projet de loi organise la privatisation du Groupe ADP et le retour de l’ensemble des actifs aéroportuaires franciliens à terme à l’Etat, dont le pouvoir de régulation sera renforcé.

La cession de participations publiques permettra l’entrée de nouveaux actionnaires qui accompagneront le groupe dans l’atteinte des plus hauts niveaux en termes d’innovation, de service public et de qualité de service, ainsi que dans la poursuite de sa stratégie de consolidation de croissance à l’international. La cession sera une opération patrimoniale majeure et profitable compte tenu du faible rendement de l’action du groupe par rapport au reste du portefeuille de l’Etat. Il est prévu le retour dans le patrimoine de l’Etat des actifs aéroportuaires franciliens à l’issue d’une durée d’exploitation de 70 ans. Pendant cette période, les actifs seront incessibles sauf autorisation expresse de l’Etat. De plus, l’État pourra mettre un terme à l’exploitation des aérodromes confiés à Aéroports de Paris si l’entreprise commet des fautes d’une particulière gravité ou se trouve placée dans une situation mettant en danger la poursuite dans de bonnes conditions de ses missions de service public.

Le principe dit de la « caisse aménagée » est confirmé, c’est-à-dire le financement du service public par les redevances aéroportuaires et par une partie seulement des recettes commerciales de
l’opérateur. Ce système permet d’assurer une incitation de la société à investir dans les infrastructures aéroportuaires et à développer ainsi le trafic de la plateforme et la connectivité de la France avec le reste du monde.

Les pouvoirs du Ministre chargé de l’aviation civile en matière de définition, de contrôle et de sanction des obligations de service public confié à la société Aéroports de Paris sont formalisés dans le cahier des charges de la société. Les obligations d’information d’Aéroports de Paris vis-à-vis de l’État sont également renforcées. Parallèlement, la régulation de l’Etat sera renforcée.

L’Etat disposera pour la première fois d’un pouvoir d’autorisation par la loi sur les investissements, les travaux et les changements de contrôle de la société. La signature d’un contrat de régulation économique pluriannuel tous les 5 ans demeurera entre le groupe et l’Etat. En l’absence d’accord, l’Etat pourra fixer les redevances facturées aux compagnies aériennes, les investissements nécessaires au service public et les objectifs de qualité du service public.

Cette réforme entrera en vigueur simultanément au transfert de l’entreprise au secteur privé.

Article 51 : Transfert de la majorité du capital de la Française des Jeux (FDJ) au secteur privé

La Française des Jeux est une entreprise publique créée il y a quarante ans, héritière de la loterie nationale datant de 1933. Elle est titulaire de droits exclusifs en matière d’organisation et d’exploitation de jeux d’argent et de hasard.

Cet article vise à autoriser le transfert au secteur privé de la majorité du capital de La Française des Jeux (72% aujourd’hui) tout en la maintenant sous le contrôle strict de l’État permettant à ce dernier de continuer à prévenir le jeu excessif, protéger les populations vulnérables (notamment les mineurs) et lutter contre la fraude et le blanchiment d’argent.

L’entreprise mène en effet une stratégie de modernisation et de transformation de son activité pour continuer à être un leader européen. Pour relever ces défis, l’élargissement de son actionnariat lui offrira des opportunités de développement. Une autorité indépendante sera mise en place, avant la privatisation, sur les bases des recommandations qui seront faites par une mission mandatée par le Gouvernement. Elle offrira les meilleures garanties en termes de lutte contre le jeu excessif, le jeu des mineurs, la fraude et le blanchiment d’argent. Les pouvoirs de contrôle et de police administrative de l’État pourront par ailleurs être renforcés, de même que les sanctions administratives et pénales existantes. Cette régulation ne rend plus nécessaire la présence majoritaire de l’État au capital de la FDJ.

Les droits exclusifs confiés par l’État à la FDJ et la régulation qui y est associée sont les garants du respect des impératifs de maintien de l’ordre public et de santé publique, à l’origine même de l’activité de la FDJ. Ils seront réaffirmés dans la loi et attribués désormais à la FDJ pour une durée déterminée (maximum 25 ans). À l’issue de la privatisation, l’État restera actionnaire minoritaire de l’entreprise pour continuer de participer à la gouvernance et au contrôle étroit de l’entreprise qui conservera le monopole dont elle dispose actuellement. Pour ce faire, le Gouvernement est habilité à prendre par ordonnance diverses mesures visant à préciser les conditions d’exercice par la FDJ de ses activités, à renforcer les pouvoirs de contrôle de l’Etat sur le secteur (notamment la définition des conditions d’exploitation des droits exclusifs et la vérification du respect des obligations légales), à définir les conditions et les garanties indispensables à la réalisation de ses objectifs.

A noter que le régime fiscal des jeux et paris de La Française des Jeux sera précisé dans le cadre de la loi de finances pour 2019.

Article 52 : Composition du capital des sociétés ENGIE et GRTgaz

Aujourd’hui, le Code de l’énergie contraint l’État à détenir un tiers du capital ou des droits de vote dans ENGIE, ce qui le prive de marge de manœuvre. La participation actuelle de l’Etat au capital d’ENGIE mobilise ainsi 7,8 Md€, soit 24,1% du capital et 34,8% des droits de vote. Pourtant, la régulation, sur laquelle l’Etat conserva totalement la main, et l’action spécifique dont il dispose, qui lui donne un droit d’opposition, suffisent à assurer la sécurité d’approvisionnement en gaz de la France. La détention d’un tiers du capital n’est donc pas nécessaire. Ainsi, cet article allège la contrainte de détention portant sur le capital de GRTgaz en ne requérant plus qu’une détention majoritaire par ENGIE ou des entités publiques. En outre, il propose d’abroger la condition de détention du capital de GDF-Suez, c’est-à-dire Engie, à plus du tiers par l’État.

Le gouvernement ne prévoit pas de sortir rapidement du capital d’ENGIE, mais si sa participation devait évoluer, l’État serait très vigilant dans sa recherche d’investisseurs. Il privilégierait les acteurs de long terme à même de conforter l’ancrage français et européen du groupe.

Article 53 : Bpifrance

Cet augmente le nombre de représentants de l’État au conseil d’administration de l’EPIC Bpifrance de 5 à 6 afin que le Secrétariat général pour l’investissement (SGPI) puisse y être représenté, étant donné que celui-ci aura un rôle de coordination et de suivi de l’utilisation des revenus du Fonds pour l’innovation de rupture.

L’article vise également à étendre les ressources possibles de Bpifrance afin que celui-ci puisse percevoir des intérêts sur les produits de cession d’actifs de l’État reçus en dotation par l’État. Cette rémunération permettra de financer les dispositifs de soutien à l’innovation, en particulier le Fonds pour l’innovation de rupture.

Focus sur le Fonds pour l’innovation de rupture

Les technologies de rupture ont vocation à devenir les moteurs de la croissance de demain et auront des impacts majeurs sur nos façons de vivre et de travailler. Elles requièrent des investissements initiaux très importants, sont caractérisées par un taux d’échec élevé et une mise sur le marché plus lointaine. Ainsi, le financement, sur le long terme, de ces innovations est
une des priorités du Gouvernement. La souveraineté technologique de la France et de l’Europe dans les secteurs d’avenir est également un des enjeux majeurs des prochaines années. Dans une compétition internationale, les investissements massifs sur l’innovation et l’industrie sont une nécessité pour se maintenir face aux pays concurrents. C’est pour répondre à ces constats que le Fonds pour l’innovation de rupture a été lancé le 15 janvier 2018. Il consiste en un ensemble d’actifs de 10 Md€ dont a été doté l’établissement public Bpifrance, structure contrôlée par l’État.

Le Fonds est constitué initialement de 1,6 Md€ en numéraire, issus des cessions d’actifs effectuées au second semestre 2017 (Renault et ENGIE), et de 8,4 Md€ en titres de participations publiques (Thales et EDF). Ces titres ont vocation à être progressivement remplacés par les produits des cessions de participations publiques à venir, au cours du mandat. Ces 10 Md€ d’actifs, qui constituent une dotation n’ayant pas vocation à être consommée, génèreront un rendement annuel estimé entre 200 et 300 M€ qui servira au financement de dispositifs de soutien à l’innovation de rupture.

 

Article 54 : Composition du conseil d’administration de La Poste

Cet article vise à articuler les dispositions régissant la composition du conseil d’administration de La Poste avec l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique.

Article 55 : Modifications du régime de sanction des investissements étrangers en France

Lorsqu’ils sont de nature à porter atteinte à l’ordre public, à la sécurité publique ou aux intérêts de la défense nationale, les investissements étrangers sont soumis à une autorisation préalable du
ministre chargé de l’économie (procédure dite « IEF »). Cette procédure est aujourd’hui peu dissuasive et non adaptée aux technologies d’avenir.

C’est pourquoi cet article propose :

  • d’élargir le contrôle à de nouveaux secteurs stratégiques, tels que les drones ou l’intelligence artificielle ou le stockage de données ;
  • de renforcer les pouvoirs d’injonction du Ministre de l’Économie et des Finances : modification de l’opération, rétablissement de la situation antérieure, cession des activités
    sensibles ;
  • de renforcer les sanctions ;
  • de créer la possibilité pour les entreprises de saisir l’administration en amont pour savoir si l’opération de cession est soumise à la procédure d’autorisation préalable.

 

Article 56 : Actions spécifiques dans les sociétés à participation publique

Les mécanismes d’actions spécifiques ou « golden shares » permettent, en l’état actuel de la législation, à l’État de conserver un contrôle sur les actifs sensibles des entreprises dont l’État se désengage lorsque la protection des intérêts essentiels du pays en matière d’ordre public, de santé publique, de sécurité publique, ou de défense nationale est en jeu.

Il est proposé de réviser ce dispositif de manière à :

  • étendre la possibilité de créer une action spécifique en-dehors de l’hypothèse d’une cession de participation de l’État, afin de renforcer la protection des entreprises stratégiques dont l’État ou Bpifrance est actionnaire minoritaire ;
  • clarifier les droits attachés à une action spécifique. La notion de cession est précisée (notamment afin de couvrir aussi les actifs immatériels), ainsi que les conditions dans lesquelles le ministre chargé de l’économie peut obtenir communication des informations nécessaires à l’exercice des droits liés à l’action spécifique ;
  • préciser les conditions dans lesquelles une action spécifique peut être modifiée (en cours de vie, réévaluation quinquennale) dans le but de clarifier le signal envoyé aux investisseurs et aux différentes parties prenantes.

CHAPITRE III : DES ENTREPRISES PLUS JUSTES

SECTION 1 : MIEUX PARTAGER LA VALEUR

ARTICLE 57 : Favoriser la mise en place et le développement d’accords de participation et d’intéressement

Afin d’encourager l’épargne salariale, cet article supprime le forfait social (passé de 8% à 20% en 2012) pour les entreprises de moins de 50 salariés sur les versements issus des primes d’intéressement et de participation, ainsi que sur les abondements des employeurs. Il supprime également le forfait social pour les entreprises de 50 à 250 salariés qui disposent ou concluent un accord d’intéressement.

Également, afin d’encourager l’actionnariat salarié, le forfait social est diminué de moitié (10 %) sur l’abondement par l’employeur sur les fonds d’actionnariat salarié. Par ailleurs, cet article simplifie la création d’accords de participation et d’intéressement, ainsi que la continuité de l’accord en cas, notamment, de modifications de la situation juridique de l’entreprise. Enfin, afin d’élargir le champ des bénéficiaires, il encourage les branches à négocier un dispositif d’intéressement, de participation ou de plan d’épargne salariale au profit des entreprises de la branche.

ARTICLE 58 : Favoriser le développement et l’appropriation des plans d’épargne salariale

Les plans d’épargne salariale se composent d’un plan d’épargne entreprise (PEE) et, éventuellement, d’un plan d’épargne pour la retraite collectif (PERCO), qui peut actuellement être ouvert par toute entreprise disposant déjà d’un PEE. Le PEE est obligatoire en cas d’accord de participation au sein de l’entreprise, le PERCO reste facultatif.

Le présent article vise à faciliter le développement des plans d’épargne salariale. Tout d’abord, il lève la condition de disposer d’un PEE pour mettre en place un PERCO. Puis, afin d’accroître la transparence et la portabilité des droits acquis, il harmonise la présentation des relevés annuels de situation transmis aux salariés.

ARTICLE 59 : Stimuler l’actionnariat salarié dans les entreprises privées

L’actionnariat salarié peut se traduire par une participation directe des salariés au capital de l’entreprise, notamment via l’attribution d’actions gratuites (AGA) ou des bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE). Il peut également se traduire par la détention de parts de fonds d’actionnariat salarié (FCPE) via un PEE. Toutefois, l’abondement du PPE ne peut, aujourd’hui, être unilatéral. Pour encourager l’actionnariat salarié, le présent article vise donc à permettre l’abondement unilatéral de l’employeur sur les fonds d’actionnariat salarié. Les actions ou certificats d’investissement ne seront disponibles qu’après cinq ans à compter de ce versement. Les plafonds et les modalités de versement seront fixés par décret.

ARTICLE 60 : Développement de l’actionnariat salarié des sociétés à capitaux publics

L’État a pour obligation, en cas de cession d’une participation dans une entreprise dont il détient au moins 10 % du capital, de proposer 10 % du volume total de titres cédés aux salariés et anciens salariés éligibles de l’entreprise : il s’agit du dispositif d’offre réservée aux salariés (ORS). Ce dispositif permet aux salariés d’acquérir des actions en bénéficiant d’une décote. De plus, il leur permet de participer à la gouvernance de l’entreprise.

Le présent article vise à élargir le périmètre de ce dispositif à toutes les formes de cessions. Cependant, afin de simplifier le dispositif, il est proposé d’introduire des seuils de matérialité et de limiter le volume de titres proposés à un plafond en fonction de la capacité de souscription des salariés éligibles. Les modalités de ces deux mesures seront précisées par décret.


SECTION 2 : REPENSER LA PLACE DES ENTREPRISES DANS LA SOCIÉTÉ

ARTICLE 61 : L’objet social des entreprises

Actuellement, l’article 1833 du Code civil détermine l’objet de toute société comme étant « l’intérêt commun des associés ». Ainsi, le droit français ne définit pas en quoi doit consister cet intérêt commun ou l’intérêt général des sociétés. Même si le besoin de définir des catégories mixtes a trouvé plusieurs relais législatifs (par exemple : définition des coopératives ou des entreprises sociales et solidaires), il apparait aujourd’hui nécessaire de consacrer la notion de « l’intérêt social » des entreprises. De ce fait, suivant les recommandations du rapport « l’entreprise, objet d’intérêt collectif » réalisé par Jean-Dominique SENARD et Nicole NOTAT, il est proposé, tout en gardant une forme de souplesse, d’entériner, dans le Code civil, l’application qui est faite de cette notion en jurisprudence en l’élargissant et complétant l’article 1833 du Code civil par un alinéa ainsi rédigé :

« La société est gérée dans son intérêt social et en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité ».

Également, le présent article vise à permettre aux associés de toute société d’inscrire dans les statuts de l’entreprise sa raison d’être. Il s’agit là aussi des suites d’une recommandation issue dudit rapport. Il est donc proposé d’ajouter à l’article 1835 du Code civil une mention correspondant au fait que « les statuts peuvent préciser la raison d’être dont la société entend se doter dans la réalisation de son activité ». Ces deux modifications seront également inscrites dans le code du commerce.

ARTICLE 62 : Les administrateurs salariés

Actuellement, les sociétés anonymes (SA) et les sociétés en commandite par actions (SCA) qui, avec leurs filiales, emploient après deux exercices consécutifs au moins 1 000 salariés en France ou au moins 5 000 au niveau mondial, doivent désigner un ou deux administrateurs salariés pour siéger au sein de leur conseil d’administration (CA) ou de surveillance (CS). Ce dispositif a été renforcé par la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi dont le but était d’accorder de nouveaux droits aux représentants des salariés.

L’article 62 prévoit de porter le nombre d’administrateurs salariés au sein du conseil à 2 à partir de 8 administrateurs non-salariés, alors que la loi ne prévoit actuellement la présence de deux administrateurs salariés que lorsqu’il y a plus de 12 administrateurs non-salariés. Cet article vise aussi, conformément aux recommandations du rapport NOTAT-SENARD, à étendre aux organismes régis par le code de la Mutualité la participation de représentants des salariés au conseil d’administration.


CHAPITRE IV : DIVERSES DISPOSITIONS D’ADAPTATION AU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE, DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES

ARTICLE 63 : Transposition de la directive 2014/55/UE facturation électronique

Le présent article vise à habiliter le Gouvernement à prendre des mesures par ordonnance afin de garantir la transposition de la directive n° 2014/55/UE du 16 avril 2014 relative à la facturation électronique. La transposition de cette directive implique, entre autres, l’obligation de recevoir des factures électroniques dans un format européen. Cette transposition renforcera le dispositif de facturation électronique issue des dispositions de l’ordonnance n° 2014-697 et du décret n° 2016- 1478 du 2 novembre 2016, en réduisant notamment les délais de paiement. Elle permettra de franchir une étape supplémentaire dans la simplification de l’exécution de l’ensemble des contrats de la commande publique.

ARTICLE 64 : L’insolvabilité

L’article 64 anticipe la transposition du projet de directive dite « insolvabilité », publié par la Commission européenne le 22 novembre 2016 et actuellement en cours de discussion, afin d’habiliter Gouvernement à prendre les mesures législatives au plus vite pour la transposition de la directive envisagée au premier semestre de 2019. Cette anticipation est justifiée par le fait que les principaux objectifs du projet de directive (restructuration préventive, seconde chance des entrepreneurs, efficacité des procédures de restructuration et d’insolvabilité) correspondent aux objectifs du présent texte notamment en termes de rebond des entrepreneurs.

ARTICLE 65 : Transposition de la directive 2014/50/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 relative aux prescriptions minimales visant à accroître la mobilité des travailleurs entre les États membres

La directive 2014/50/UE vise à faciliter l’exercice du droit à la libre circulation des travailleurs entre les États membres de l’Union européenne en réduisant les divergences créées par les règles de fonctionnement de certains régimes complémentaires facultatifs de retraite. Le présent article habilite le Gouvernement à la transposer par voie d’ordonnance. Cela conduira notamment à mettre fin aux régimes de retraite dont les droits sont conditionnés à la présence dans l’entreprise au-delà du délai de 3 ans. En effet, la directive prévoit que les droits à retraite supplémentaire devront être considérés comme acquis au-delà de cette période (ou moins) et précise que lorsque la relation de travail cesse avant l’acquisition de droits à pension, le régime de pension doit rembourser les cotisations versées par le travailleur sortant ou en son nom.

 

ARTICLE 66 : Transposition de la directive (UE) 20 17/8 28 du 17 mai 2017 sur les droits des actionnaires

Une partie du présent article (I, II, III) transpose directement plusieurs mesures de la directive en vue de promouvoir l’engagement à long terme des actionnaires, alors qu’une autre partie de l’article (IV, V) habilite le Gouvernement à transposer le reste par voie d’ordonnance. La directive met en place des mesures de transparence, visant notamment à identifier les actionnaires et les intermédiaires, et des mécanismes incitatifs destinés à promouvoir, auprès des investisseurs, les investissements de long terme, la surveillance de la gestion des investissements par les gestionnaires d’actifs, et leur implication actionnariale. Le présent article permet de transposer ces dispositions en droit français, sans y ajouter d’autres obligations.

ARTICLE 67 : Habilitation à transposer la directive (U E) 2016/2341 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2016 concernant les activités et la surveillance des institutions de retraite professionnelle (IRP)

La directive 2016/2341, dont cet article autorise la transposition par voie d’ordonnance, fixe au niveau européen le cadre d’exercice pour les organismes dédiés à la gestion d’engagement de retraite professionnelle, pour des travailleurs salaires ou non, elle n’est a priori pas destinée à s’appliquer aux régimes de retraite obligatoires. Il est notamment prévu d’aménager le cadre des organismes de retraite professionnelle supplémentaire pour en accroître l’attractivité et éventuellement en élargir le champ d’activités. Il s’agit d’un enjeu important pour la place de Paris et cette réforme pourrait permettre d’ouvrir un nouveau secteur aux acteurs français.

ARTICLE 68 : Mesures nécessaires pour transposer la directive relative à la réforme européenne de la hiérarchie des créanciers bancaires (Directive 2017/2399/UE ) adoptée le 12 décembre 2017

La directive 2017/2399, dont le présent article prévoit la transposition, vise à créer un nouveau rang de privilège pour les créanciers titulaires d’une créance sur l’établissement par rapport aux créanciers titulaire d’une créance ordinaire ou chirographaire dite communément « senior non préférée ». Cette réforme européenne reprend les modalités de la réforme française adoptée avec l’article 151 de la loi du 9 décembre 2016, elle s’applique toutefois à un champ plus large d’entités que ce que prévoit aujourd’hui la loi et qui n’est applicable qu’aux établissements de crédit. Cette réforme permettra d’améliorer la capacité des établissements de crédit à faire face à leurs obligations de capacités d’absorption de pertes et de renforcement de la stabilité financière.

ARTICLE 69 : La transposition du « paquet Marques »

Le « paquet Marques », dont le présent article autorise la transposition par voie d’ordonnance, fait suite au constat d’une divergence des pratiques des marques et d’un faible niveau de coopération entre les offices nationaux de propriété industrielle, qui a conduit, en décembre 2015, à l’adoption du « paquet Marques »14 rapprochant les législations des États membres sur les marques.

La directive a introduit d’importantes modifications afin de moderniser et simplifier le système des marques : allègement des modalités de dépôt, suppression de l’exigence de représentation graphique, adjonction de nouveaux motifs de refus d’enregistrement et d’annulation de la marque, encadrement et distinction de régime entre les marques collectives et les marques de certification, renforcement de la procédure d’opposition des marques, introduction d’une procédure administrative de déchéance et d’annulation des marques nationales enregistrées, renforcement de la lutte contre la contrefaçon par le rétablissement des contrôles douaniers sur les marchandises en transit. Par ailleurs, la directive impose une refonte du système français des marques collectives de certification par la création de deux régimes distincts (marques collectives d’une part, marques de garantie ou de certification d’autre part).

ARTICLE 70 : La possibilité de procéder à une réévaluation comptable des immobilisations corporelles des grands ports maritimes relevant de l’État et des ports autonomes de Paris et de Strasbourg

La loi n° 2008-660 du 4 juillet 2008 portant réforme portuaire a transformé 7 ports autonomes en grands ports maritimes (GPM). Les grands ports maritimes et les deux ports fluviaux autonomes de Paris et Strasbourg sont des établissements publics de l’État. Contrairement aux entreprises commerciales, ces établissements ne peuvent pas procéder à une réévaluation libre de l’ensemble de leurs immobilisations corporelles. Le présent article a donc pour objet de permettre à ces établissements, sur l’exercice 2017, de réévaluer leurs immobilisations corporelles à la valeur de marché afin que leur comptabilité reflète une image plus actuelle et plus juste de leur patrimoine.

ARTICLE 71 : Diverses ratifications d’ordonnances

L’article 71 vise à ratifier 23 ordonnances. Parmi les plus importantes, il prévoit notamment la ratification de :

  • l’ordonnance n° 2014-696 du 26 juin 2014 favorisant la contribution de l’assurance vie au financement de l’économie ;
  • l’ordonnance n° 2015-558 du 21 mai 2015 relative aux succursales établies sur le territoire français d’établissements de crédit ayant leur siège social dans un État qui n’est pas membre de l’Union européenne ni partie à l’accord sur l’Espace économique européen ;
  • l’ordonnance n° 2016-312 du 17 mars 2016 nécessaire notamment à la transposition de la directive 2014/91/UE, dite directive « OPCVMV » (refondre les règles européennes relatives aux dépositaires agissant pour le compte d’OPCVM) ;
  • l’ordonnance n° 2016-1575 du 24 novembre 2016 portant réforme du dispositif de gel des avoirs, gel des avoirs décidées par le Conseil de sécurité des Nations unies ou le Conseil de l’Union européenne ;
  • l’ordonnance n° 2016-1635 du 1er décembre 2016 renforçant le dispositif français de lutte contre le blanchiment et le financement, renforçant notamment la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale ;
  • l’ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l’autorisation environnementale, qui concerne notamment l’expérimentation d’une autorisation unique en matière d’installations classées pour la protection de l’environnement ;
  • l’ordonnance n° 2017-734 du 4 mai 2017 qui a rénové le code de la mutualité, notamment en rénovant la gouvernance des organismes mutualistes et en améliorant la protection et l’information du consommateur ;
  • l’ordonnance n° 2017-1090 du 1er juin 2017 relative aux offres de prêt immobilier conditionnées à la domiciliation des salaires ou revenus assimilés de l’emprunteur sur un compte de paiement ;
  • l’ordonnance n° 2017-1107 du 22 juin 2017 qui a visé l’adaptation du droit interne à la directive 2014/65/UE (dite MiFID II) et au règlement (UE) n° 600/2014 (dit MiFIR), et la séparation du régime juridique des sociétés de gestion de portefeuille de celui des entreprises d’investissement ;
  • l’ordonnance n° 2017-1432 du 4 octobre 2017 portant modernisation du cadre juridique de la gestion d’actifs et du financement par la dette ;
  • l’ordonnance n° 2017-1608 du 27 novembre 2017 relative à la création d’un régime de résolution pour le secteur de l’assurance et l’ordonnance n° 2017-1609 du 27 novembre 2017 relative à la prise en charge des dommages en cas de retrait d’agrément d’une entreprise d’assurance.

 

ARTICLES 72 ET 73

Les articles 72 et 73 visent à rendre applicable dans les collectivités soumises au principe de spécialité législative, les modifications des dispositions, respectivement du code monétaire et financier, et du code de commerce, introduites par le présent projet de loi, avec les adaptations nécessaires à la prise en compte de leurs compétences propres.

 

Projet de loi complet : http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/projets/pl1088.pdf


VOTE SOLENNEL DU 9 OCTOBRE 2018

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